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Transmission au mémorial de la prison de Montluc : quand la mémoire unit les générations



Visite familiale au Mémorial de la prison de Montluc : Un devoir de mémoire intergénérationnel


Le samedi 15 mars 2025, une partie de notre grande famille Gascon, forte de quarante membres de toutes générations confondues, s'est rassemblée pour une visite chargée d'émotion au mémorial de la prison de Montluc à Lyon. Ce lieu de mémoire est particulièrement marquant pour nous, car c'est ici que Pierre Gascon et son père Paul, résistants déportés, furent incarcérés et interrogés avant d'être envoyés dans l'enfer concentrationnaire de Buchenwald et Dora.


Paul Gascon ne survivra pas à la barbarie nazie : après un passage par Buchenwald, il est transféré au camp annexe de Dora, où les déportés travaillaient dans des conditions inhumaines à la fabrication des fusées V2. C’est dans le tunnel souterrain de Dora – un vaste complexe creusé dans la montagne, sans lumière naturelle, saturé de poussière et de gaz toxiques, où les prisonniers travaillaient jour et nuit – qu’il trouvera la mort. Ce lieu symbolise l’une des pires formes d’exploitation concentrationnaire, mêlant épuisement, malnutrition et violences extrêmes. Pierre Gascon, quant à lui, survivra à cette déportation et deviendra plus tard un infatigable porteur de mémoire et le fondateur d’une grande famille.


Le mémorial du fort de Montluc : un lieu d'histoire et de souffrance

Construit sous le Second Empire, le fort Montluc fut initialement conçu comme un ouvrage militaire dédié à la défense de Lyon. Avant la Seconde Guerre mondiale, il servit de prison civile française. Cependant, dès l'occupation allemande en 1943, il devint une prison sous le contrôle de la Gestapo. L'administration allemande l'utilisa pour enfermer, torturer et déporter des résistants, des juifs et d'autres opposants au régime nazi. Klaus Barbie, tristement célèbre chef de la Gestapo de Lyon, y ordonna l'incarcération et les interrogatoires de nombreuses victimes, avant leur transfert vers les camps de la mort.


Pierre et Paul Gascon furent parmi ces prisonniers. Capturés pour leur engagement dans la Résistance, ils subirent des interrogatoires brutaux avant d'être envoyés à Buchenwald. Paul ne reviendra pas. Ce passage par Montluc symbolise l'une des premières épreuves de leur calvaire.


Le retour de Klaus Barbie à Montluc en 1983

En février 1983, Klaus Barbie, ancien chef de la Gestapo lyonnaise surnommé le "boucher de Lyon", a été extradé vers la France depuis la Bolivie. À son arrivée, sur instruction du ministre de la Justice de l'époque, Robert Badinter, il a été symboliquement incarcéré à la prison de Montluc du 5 au 12 février 1983. Cette décision revêtait une forte charge symbolique, car Montluc avait été, sous l'Occupation, le lieu de détention de nombreuses victimes de Barbie, notamment des résistants et des Juifs avant leur déportation. Après cette semaine de détention à Montluc, Klaus Barbie a été transféré à la prison Saint-Joseph, dans un quartier sécurisé, en attendant son procès pour crimes contre l'humanité.

Ce choix d'incarcération à Montluc, voulu par Robert Badinter, visait à confronter symboliquement Barbie aux lieux mêmes où il avait orchestré tant de souffrances, renforçant ainsi la portée mémorielle et historique de la justice rendue.


Une visite marquante et émouvante

La visite, menée par une conférencière remarquable par la précision et la sensibilité de ses explications, nous a replongés dans ces heures sombres. En parcourant les cellules et les couloirs étroits de la prison, nous avons ressenti avec intensité le poids de l'histoire et le courage de ceux qui ont combattu pour la liberté. Pour la plupart d’entre nous, cette visite nous a rappelé un autre voyage familial avec Jeanine et Pierre Gascon. C’était en 2000, pour la découverte du camp de Buchenwald et de Dora. L’émotion était déjà très présente et alimente notre mémoire avec toujours autant de force.

Un moment particulièrement poignant fut la découverte de la cellule numéro 6, où Pierre Gascon avait été enfermé, alors que son père lui, était enfermé dans un réfectoire. Aucun des deux ne savait qu'ils étaient détenus dans le même lieu au même moment, une tragédie supplémentaire de leur séjour à Montluc.

Les plus jeunes de notre famille ont été particulièrement touchés par cette transmission directe de l'histoire. Pour eux, mettre des images et des lieux sur les récits familiaux a donné une profondeur nouvelle à leur compréhension du devoir de mémoire.





Transmettre et se souvenir : un engagement familial

Cette visite a été bien plus qu’un simple moment de recueillement ; elle a été une véritable transmission intergénérationnelle. Réunir la famille Gascon dans un tel lieu, c'était rendre hommage à Pierre et Paul, mais aussi à tous ceux qui ont souffert dans ces murs et au-delà. C'était rappeler que l'histoire ne doit pas s'effacer et que la mémoire est une responsabilité collective.

Dans un monde où le temps tend parfois à atténuer l'empreinte du passé, il est essentiel de perpétuer ces moments de transmission. La famille Gascon continuera de témoigner, de raconter et de se souvenir, afin que les générations futures puissent, à leur tour, porter ce flambeau du souvenir et de la vigilance.

 
 
 

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